La réponse à ces questions apparaît comme la plus importante nouvelle de ce comité technique. Un projet de délibération sera présenté en septembre. Il mettra en œuvre un nouveau dispositif : le RIFSEEP pour Régime Indemnitaire tenant compte des Fonctions, des Sujétions, de l’Expertise et de l’Engagement Professionnel.
En novembre puis en décembre, la CGT et son UFICT avaient demandé à l’employeur s’il comptait mettre en place cette prime particulièrement décriée. La réponse était négative…
Pourquoi une telle réponse ?
Le RIFSEEP fait l’unanimité, contre lui. A l’exception de la CGC, toutes les organisations syndicales ont voté contre ce nouveau dispositif au Conseil Supérieur de la Fonction Publique d’Etat.
Pour preuve, voici nos arguments…
Le RIFSEEP ou régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l'expertise et de l'engagement professionnel, va devenir, d’ici fin 2016, le nouvel outil indemnitaire de référence en remplaçant la plupart des primes et indemnités existantes dans la fonction publique.
Le décret n° 2014-513 du 20 mai 2014 a créé un régime indemnitaire tenant compte des fonctions, des sujétions, de l’expertise et de l’engagement professionnel (Rifseep).
Ce dispositif est centré sur une indemnité principale, l’indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise (Ifse), à laquelle peut s’ajouter un complément indemnitaire.
L'IFSE ne pourra se cumuler avec - l'indemnité forfaitaire pour travaux supplémentaires - la prime de rendement - l'indemnité de fonctions et de résultats - la prime de fonctions informatiques - l'indemnité d'administration et de technicité - l'indemnité d'exercice de mission des préfectures -l'allocation complémentaire de fonctions - la prime d'activité - l'indemnité de sujétion et d’autres encore.
1) L’indemnité de fonctions, de sujétions et d’expertise (Ifse)
L’Ifse devra être versée en tenant compte du niveau de responsabilité et d’expertise requis dans l’exercice des fonctions occupées par les agents. Ces fonctions sont classées au sein de différents groupes au regard des critères professionnels suivants : fonctions d’encadrement, de coordination, de pilotage ou de conception ; technicité, expertise, expérience ou qualification nécessaires à l’exercice des fonctions ; sujétions particulières ou degré d’exposition du poste au regard de son environnement professionnel.
Pour établir la partie fixe, les postes auraient une « cote » ! 2 agents d’un même grade ne devraient plus être rémunérés de façon égale !
La cotation des postes va induire des inégalités de traitement entre agents d’un même niveau de qualification. Elle va induire également un frein à la mobilité (hésitations à prendre un poste moins bien rémunéré), une fuite des agents vers les postes les mieux côtés, et un désintérêt vis-à-vis des postes les moins bien côtés, bref, une désorganisation des services
Elle sera mensuelle, elle sera variable et ne tiendra compte que des fonctions exercées, et en second temps de notre expérience professionnelle. Les fonctions seront évaluées à partir de trois critères : encadrement, technicité et sujétions particulières. Chaque poste de travail sera ainsi rangé dans un groupe de fonctions.
Il y aura 4 groupes de fonctions pour la catégorie A, 3 groupes de fonctions pour la catégorie B, 2 groupes pour la catégorie C. Donc, un agent qui occupera un emploi d’un groupe de fonctions inférieures pourra voir son IFSE diminuer.
L’expérience professionnelle sera défi nie selon 3 critères : approfondissement des savoirs techniques, approfondissement de la connaissance de l’environnement de travail et des procédures, gestion d’un événement exceptionnel.
Il est précisé dans les textes que l’expérience professionnelle ne pourra pas être liée à l’ancienneté et que ce n’est pas le grade qui définit le groupe de fonctions.
Aucun recours ne sera possible pour contester le rattachement à un groupe de fonctions ou un niveau d’expérience. On peut présumer que seul l’entretien professionnel annuel permettra de changer le groupe de rattachement...
On pourra avoir des fonctions qui n’auront rien à voir avec notre statut. Un agent de catégorie C pourra avoir des missions d’encadrement. L’IFSE permettra de reconnaître une « compétence » d’un agent sans le rémunérer à sa valeur réelle, sans requalifier le poste dans la catégorie supérieure (en B ou A). Il faudra juste que l’agent soit placé dans un groupe de fonctions choisi par la direction. Pour les autres agents qui exercent des fonctions supérieures, s’ils ne sont pas dans le bon groupe, aucune indemnité ne sera prévue pour eux.
Ce régime individualise et remet en cause un principe fondateur du statut de la Fonction publique, celui de la séparation du grade et de l’emploi en déconnectant le régime indemnitaire du grade de l’agent et de son ancienneté. Ce n’est plus le grade et l’ancienneté (concours passé et carrière) qui déterminent notre traitement mais notre « métier » et notre « mérite ». Les notions de « métier », de « groupe de fonctions » et de « compétences » remplacent les garanties liées à la qualification, à la réussite à un concours, au droit à la carrière, au statut et à cette séparation du grade et de l ‘emploi.
Avec l’IFSE et le CIA, la hiérarchie pourra de manière discrétionnaire fixer le montant de l’indemnité et ainsi remettre en cause notre droit à la carrière. Si l’existence de plusieurs groupes, ainsi que le nombre de groupes par catégorie, ne pourront pas être modifiés, car fixés par le décret, il faut souligner que le CIA, lui, est facultatif.
Ce dispositif aura pour effet de briser les équipes de travail et les réseaux de solidarité sur les lieux de travail. Car la règle d’application de ce dispositif se fait à budget constant : si on veut augmenter la prime de Paul, il faudra baisser, voire supprimer celle de Pierre !
2) Le complément indemnitaire annuel (CIA)
Le complément devra tenir compte de l’engagement professionnel et de la manière de servir, appréciée au moment de l’évaluation ou de la notation. Le versement de ce complément est facultatif.
Un barème devra être fixé par groupe de fonctions et ne devrait pas excéder le plafond global du RIFSEEP : 15% pour les groupes de catégorie A - 12% pour les groupes de catégorie B - 10% pour les groupes de catégorie C.
C’est la prime au mérite, ce sacrosaint mérite si cher à nos directions. C’est à la fois la carotte et le bâton. Si pas de mérite, pas de CIA. Si beaucoup de mérite, alors beaucoup de CIA. Le mérite, répétons-le, n’est pas codifiable.
Un agent méritant peut être aussi bien un agent qui a toujours fait son travail correctement, qu’un agent surdiplômé par rapport au niveau de poste qu’il occupe, ou un agent très dévoué (ce qui n’exclue pas les deux appréciations précédentes), ou encore un bon porteur de valises parfois surnommé lèche bottes. Un non méritant peut être celui qui ne fait pas le travail attendu, celui qui est malade, celui qui conteste ou revendique, etc. En résumé, le CIA, c’est « à la tête du client ».
Le RIFSEEP, dans sa totalité, c’est aussi « à la tête du client ».