Une réduction de huit jours des congés payés dans la fonction publique, qui passeraient ainsi de 38 à 30 jours. C’est la mesure “phare” que le nouveau gouvernement finlandais de droite compte mettre en œuvre afin de sortir le pays de la crise dans laquelle celui-ci se trouve depuis trois ans. Ce plan d’austérité, qui vise à abaisser le coût du travail de 5 %, inclut d’autres mesures drastiques : les heures supplémentaires seront payées deux fois moins, la durée des indemnisations chômage sera divisée par deux, de 500 à 250 jours.
Autre idée lancée par le Premier ministre, Juha Sipilä, lors de sa déclaration de politique générale en juillet dernier, le principe d’un revenu universel de base de 1 000 euros pourrait concerner tous les Finlandais, quels que soient leur âge ou leur condition sociale. Charge à chacun de le compléter en tant que salarié ou qu’entrepreneur. En contrepartie, les aides sociales et les retraites seraient supprimées.
Dans les sondages, la population soutient à 79 % cette mesure. Le gouvernement finlandais compte ainsi réaliser paradoxalement de substantielles économies avec la simplification administrative et la suppression de postes de fonctionnaires que ce revenu peut impliquer.
Lanterne rouge de la zone euro
Arrivé en tête lors du scrutin d’avril dernier, Juha Sipilä, qui dirige une coalition de trois partis, avait prévenu ses concitoyens que le remède allait être sévère pour faire redémarrer l’activité économique du pays, à l’arrêt depuis plus de trois ans. Le produit intérieur brut (PIB) est inférieur de 0,3 % à celui de 2010, contre une progression de 2,9 % sur la même période pour la zone euro. Malgré un PIB par habitant qui reste toujours élevé, la Finlande fait figure de plus mauvais élève des 19 pays de la zone euro, à peine devant les pays du Sud (Grèce, Portugal, Espagne et Italie).
Problème essentiel, la production industrielle a reculé de 1,3 % en un an. Principal fer de lance de l’économie nationale entre 1995 et 2008, Nokia a connu de forts trous d’air. L’activité forestière et la fabrication de papier sont en berne et l’un de ses premiers importateurs, la Russie, se porte mal.
Contrairement aux autres pays européens en difficultés financières, où la très forte dette était en cause, la rigueur budgétaire est un credo en Finlande. Avec une dette à hauteur de 63 % de son PIB, la Finlande est dans les clous. Mais le taux de chômage augmente régulièrement, pour atteindre à présent 10 % de la population active. Au lieu de soutenir la faible croissance par la dépense publique – ce qui creuse la dette –, les gouvernements successifs ont choisi de l’alimenter par des hausses de salaires.
Un ancien commissaire européen à la manœuvre
Le plan finlandais d’austérité vise donc avant tout à baisser les coûts salariaux en touchant les salariés plutôt qu’en relançant l’investissement. Les partenaires sociaux ont beau avoir négocié, le gouvernement a annoncé que la seule issue pour les syndicats était d’accepter une augmentation légale de 20 minutes du temps de travail. Les syndicats ont évidemment dénoncé ces mesures, qui “vont mettre à mal les négociations tripartites, les accord collectifs, et la culture du compromis”, explique dans un communiqué le président du syndicat de fonctionnaires Pardia, Niko Simola.
Dans un pays où le consensus était une tradition, les syndicats ont organisé une immense grève générale le 18 septembre dernier ainsi qu’une manifestation suivie par 30 000 personnes. La majorité des trains et des transports urbains ont été supprimés.
Le train de mesures devrait être présenté au Parlement ces prochains jours afin d’entrer en vigueur en mars 2016. Il sera mis en œuvre par Olli Rehn, le ministre des Finances, ancien commissaire européen qui a supervisé les travaux de la Troïka – regroupant la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le FMI –, à l’œuvre en Grèce depuis 2010.
Jean-Bernard Gallois
http://www.acteurspublics.com/2015/10/01/la-finlande-decouvre-l-austerite-ses-fonctionnaires-aussi